Les plaintes d'Ariane par Anna de Noailles
Le vent qui fait tomber les prunes,
Les coings verts,
Qui fait vaciller la lune,
Le vent qui mène la mer,
feuilles soulevées
ce vent de l’hiver austral
saison tropicale
(frl)
jusqu'au crépuscule
la corde à linge immobile
près des framboisiers
(bb)
nuit des Perséides
la saison des mirabelles
vient de commencer
(mm)
Le vent qui rompt et qui saccage,
Le vent froid,
Qu’il vienne et qu’il fasse rage
Sur mon coeur en désarroi !
le bruit sous la porte
traversant tout le couloir
signature du vent
(frl)
hublot de l'avion
des lignes de pluie se joignent
London-southend
(bb)
Les alizés d’aout
en un instant balayé
le nuage coeur
(mm)
Qu’il vienne comme dans les feuilles
Le vent clair
Sur mon coeur, et qu’il le cueille
Mon coeur et son suc amer.
par la vitre ouverte
pailles coupées et blanchies
l'été qui défile
(bb)
marcher dans le vent
les cheveux ébouriffés
de rudes caresses
(frl)
Saluant le jour
cardinal au poitrail rouge
oublier le vent
(mm)
Ah! qu’elle vienne la tempête
Bond par bond,
Qu’elle prenne dans ma tête
Ma douleur qui tourne en rond.
la grimace courbe
masque africain patiné
par le sang sorcier
(bb)
grondements du vent
toutes les branches agitées
dans le crépuscule
(frl)
arbre familier
lessive claquant au vent
pensées de vacances
(mm)
Ah! qu’elle vienne, et qu’elle emporte
Se sauvant,
Mon coeur lourd comme une porte
Qui s’ouvre et bat dans le vent.
la porte qui claque
dans le vent les rideaux flottent
au loin les oiseaux
(frl)
au cinquième étage
bourrasque emportant l'été
bras nus qui frissonnent
(bb)
Volets entrouverts
comme un sanglot dans la nuit
le vent qui passait
(mm)
Qu’elle l’emporte et qu’elle en jette
Les morceaux
Vers la lune, à l’arbre, aux bêtes,
Dans l’air, dans l’ombre, dans l’eau,
café à 3h
mon esprit aux quatre vents
petits bouts de nuit
(bb)
toute la journée
folle agitation des branches
le vent & le vent
(frl)
emportant mon rêve
craquement à ma fenêtre
un morceau de lune
(mm)
Pour que plus rien ne me revienne
A jamais,
De mon âme et de la sienne
Que j’aimais...
calme revenu
doux balancement des branches
tempête oubliée
(frl )
un volet fermé
l'autre ouvert sur la banlieue
amours à la marge
(bb)
iris solitaire
est-ce le vent frais qui rend
mon jardin plus grand ?
(mm)
(1876-1933)
« Hélas je n'étais pas faite pour être morte.»
Anna de Noailles (extrait des "Éblouissements")